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jeudi 8 décembre 2011

Cavale Finalité (2)

Elle se laisse guider, paraissant un peu absente, mais les sens en alerte, les yeux éteints, les épaules tombantes, jouant la faible, cherchant la faille dans leur surveillance, l’ouverture vers la sortie, la voie vers la liberté. Malheureusement, les flics sont pas novices… ils la gardent, la regardent, ne la quittent pas des yeux.

Le commissariat, enregistrement, le planton signe la décharge aux flics uniformisés, on la bouscule, on la pousse… du déjà vu, du déjà vécu… Arrivée dans une pièce triste et sale… plusieurs bureaux et deux mecs qui travaillent… l’un lève les yeux, la regarde l’air méprisant, l’air suffisant.

- “vide tes poches”

elle s’exécute, pas le choix… son portefeuille, il n’y a quasi rien dedans… quelques pièces de monnaies, un cran d’arrêt, quelques préservatifs, des clopes, un briquet, une boite d’allumettes…
Elle regarde le flic… grisonnant, malingre, le teint aussi vert que les murs de la pièce… ce vert un peu sale et spécial qui rapelle la couleur sur les murs des classes d’école.

Il fouille dans ses quelques affaires…. lui montre le cran d’arrêt et lui demande :
- “c’est quoi ?”
Haussant les épaules elle le toise :
-”ben…c’est un couteau suisse, M’sieur ! ”
- “tu me prends pour un imbécile ?
- “Heu…. oui, enfin, non M’sieur”
Sa réplique a fait mouche, il trémousse de rage… montrant les préservatifs, il repose la question.
- et ça ?
- elle pense *t’inquiètes à voir ta tête, t’en auras jamais l’usage !* mais sa réponse est plus correcte… enfin un peu : ”ça ne vous regarde pas Monsieur….”

Elle n’a pas le temps de se protéger, la giffle claque, c’est sur qu’elle à une marque,  mais elle s’en fout… elle a l’entrainement suffisant que pour ne pas pleurer à ce genre d’argument.

Et de rage elle fixe son regard sur le regard du flic… elle sais qu’elle ne baissera pas les yeux la première… d’ailleurs ce n’est pas une question de caractère, simplement de technique… suffit de capter le regard de l’autre, de le défier… ensuite partir en pensée, se réfugier tout au fond de son esprit et être ailleur, ne plus voir, mais surtout ne pas laisser l'autre se déconnecter.   Rêver de le mettre à terre les yeux ouverts en quelque sorte.

Très vite le poulet se sent mal à l’aise… mais il est du coté du plus fort, il est du coté de la loi.

L’interrogatoire continue… où, quand, comment ? elle ne répond pas bien à l’abri dans sa bulle, cette bulle qui ne la quitte pas… Son regard parcours maintenant le décor, elle regarde sans voir… et pourtant, ses yeux tombent sur le calendrier… on est le vendredi 11 août… la terre se déchire, elle chavire… le mardi quinze est férié, et la justice fera le pont, c’est bien connu, ils sont toujours fatigués les magistrats.

Elle prend conscience qu’elle à au moins quatre jours à passer en cellule, ici au sous-sol de ce commissariat, avant d’être déférée devant le juge, celui qu’on appelle juge de la jeunesse … seule et sans possibilité de contact, sans possibilité d’appeler à l’aide.

L’interrogatoire est suivi de la fouille… obligatoire… avilissante, mais elle n’est plus là, elle n’est plus présente… dissociation entre le corps et l’esprit… l’esprit est impossible à fouiller autant s’y réfugier…. au déshabillez-vous, elle répond par un regard méprisant… au penchez-vous, elle est aux abonnés absents.

Pourtant du coin de l’oeil surveiller son jeans, déposé là sur la chaise, parce que dans la ceinture de tissus, une petite entaille faite à la lame gilette, et introduit dedans très soigneusement le pognon en billet proprement pliés… c’est pas grand chose mais c’est toute sa fortune, sa clé pour la liberté, la clé de sa prochaine cavale… la fliquette ne voit rien, sa main caresse le tissu mais ne sent rien… ouf sauvée… enfin sauvée pour l’instant.

Descente au sous-sol, mise en bémol… passer la porte, entrer et ne pas penser… obéir à la demande :
-“Otez vos lacets s’il vous plait, votre chaîne aussi…”

Puis prendre possession de ces quelques mètres carrés… un lit dont les pieds sont rivés au sol, une planche dessus en guise de sommier, une couvrante, et, un seau dans un coin.

Ne pas oublier de lire le règlement affiché au mur, c’est obligatoire et redécouvrir que toutes les phrases commencent par les mots : il est interdit


Caly 2004

1 commentaire:

  1. Non c'est pas mal écrit. Ma preuve par neuf, La gorge s'est serrée. Je reviendrai relire, au calme.

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