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dimanche 25 mars 2012

Terminus

Un article dans le journal "le soir" (version papier du 24/3 - ou éventuellement payante sur le net) me fait écrire !

Et ce à plus d'un titre !

Attends, je te résume l'histoire, parce que sinon, tu ne vas rien comprendre à ma démarche.

Un vieux monsieur, ancien journaliste, 75 ans, à un cancer du pancréas incurable.  Il peut encore se déplacer un peu, en voiture, c'est moins fatiguant que de marcher avec une canne, et il aime encore se rendre à certaines réunions d'amis.   Un matin, voulant aller voir ses potes, il tombe et se casse le col du fémur.   Des voisins obligeants appellent une ambulance et il est conduit à l'hôpital X (que l'auteur de l'article désigne par le pseudo de "clinique Ste Hélène).  Jusque là, rien d'extraordinaire me diras-tu !

Mais voilà, le col du fémur est inopérable, la jambe mise en extension empêche tout mouvement au vieux monsieur.  De plus son cancer progresse.  Il souffre l'enfer.  Des escarres apparaissent.  Douleurs supplémentaires.  Cela dure des jours, des semaines sans espoir de guérison, ni même d'une aube de soulagement.  La morphine n'agit plus.  Ses douleurs sont intolérables.

Le vieux monsieur n'en peut plus.  La douleur, la dépendance, la déchéance de son corps, tout cela devient trop lourd à supporter.  Il demande (comme la loi l'autorise en Belgique) à pouvoir mourir dans la dignité et introduit un dossier en demande d'euthanasie.  Il n'est ni dépressif, ni défaitiste.  Simplement, il sait que son cancer est incurable, qu'aucune solution ne peut être envisagée pour réparer son col de fémur, ni qu'il sorte un jour de son lit de douleur.  Il choisit de mourir.  Un premier médecin signe sa demande pour accord. 

Et là tout se complique.  Un autre médecin qui s'occupe aussi du vieux monsieur, lui signifie que l'on accèdera jamais à sa demande.  Il faut supposer que ce médecin est une femme d'après l'article vu qu'il mentionne "elle" lorsqu'il est question de ce "médecin" 

Ci-dessous (en italique) quelques lignes, que le vieux monsieur à écrites dans une lettre au Soir, avant son décès, recopiées de l'article :

"Elle m'a dit que je fantasmais ma maladie, que j'exagérais mes souffrances, que j'étais un lâche.  Elle a pris soin de proférer ses menaces quand elle était seule dans la chambre, sans témoins au sein du personnel infirmier.  Quand j'ai dit que j'allais en parler à des proches, elle m'a accusé de la menacer.  La menacer, moi, cloué au lit, à 75 ans ?  Je n'ai demandé que le respect et qu'on entende ma demande.  On m'a dit que celle-ci était refusée et qu'on ne la pratiquerait pas dans l'établissement.  J'ai alors demandé que mon généraliste, qui me suit depuis des années, puisse la pratiquer à l'hôpital, puisque j'étais intransportable.  Nouveau refus de la direction.  Et nouveau retour de la jeune docteur, qui nie mon état, m'accuse de fabuler.  La tumeur que j'ai au pancréas, on la voit pourtant nettement sur les images de résonnance magnétique.  Je ne l'ai pas inventée"

"Sans doute la loi leur demande-t-elle, s'ils refusent de pratiquer eux-même l'euthanasie, d'adresser leur patient à un autre hôpital.  Mais me transporter dans cet état, c'était me condamner à des souffrances inimaginables.  Pourquoi ne pas accepter qu'un médecin extérieur procède dans ma chambre d'hôpital?"

"Elle m'a dit qu'elle avait le pire mépris pour moi et que j'allais apprendre ce que c'était de souffrir.  Comment peut-on dire cela à un vieillard grabataire cloué dans son lit, qui baigne dans sa merde et est couvert de blessures ouvertes?"

Finalement le vieux monsieur sera transféré vers un hôpital bruxellois, ou une équipe de médecins accepte de le prendre en charge.

"Comme ultime vexation, l'hôpital a refusé de prêter, le temps de mon transfert, le lit dans lequel je me trouvais.  J'ai dû être transféré sur une civière, ce qui a été un véritable enfer.  Malgré les précautions des ambulanciers, ma jambe a bougé et cela à déclenché une hémorragie.  Je sais que la clinique où l'on m'a refusé l'euthanasie mise beaucoup sur une nouvelle vaste unité de soins palliatifs avec laquelle elle fait son beurre.  Mais est-ce une raison pour refuser de m'accorder un départ digne et de m'infliger des souffrances inhumaines?  J'ai vécu l'enfer sur terre."

Finalement le vieux monsieur est décédé lundi 19 mars, selon ses désirs, avec l'aide médicale demandée.

Il a envoyé une lettre au journal avec la demande expresse de ne publier l'article qu'une fois qu'il serait "parti".

.....

Je sais que le sujet fait débat en France (période électorale oblige) mais chez nous en Belgique, la loi autorisant à la fois le "refus de l'acharnement thérapeutique" et "l'euthanasie" existe depuis environ 10 ans.

J'ai envie d'ouvrir le débat ici.  Cela vous dit ?   Si oui, tant mieux, si non, tant pis.

Je propose que les arguments des uns et des autres, des pour et des contres soient remontés en "billet" pour la clarté du dialogue, mais toute autre avis est bienvenu :)

A vous...



10 commentaires:

  1. Le sujet me passionne.
    Je reviendrai lorsque j'aurai du temps devant moi pour argumenter.
    Ce témoignage est accablant et capital, tu as bien fait de le relayer !
    Donc à plus, peut-être dans la journée, au pire demain.
    Bisous

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    1. Très heureuse de pouvoir en débattre avec toi :)

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  2. En ce qui me concerne, le droit à la dignité prime sur tout le reste.
    Lorsque d’évidence, la vie n’est plus que souffrance et dépendance, j’estime que la seule personne apte à demander la fin de sa vie est bien le malade lui-même. Et d’évidence aussi, nous devons l’aider du mieux possible à accéder à cette demande.
    En France, l’euthanasie est encore illégale. Pourtant, d’une certaine manière, nous avons aidé, ma sœur et moi, avec l’aide des médecins, à abréger les souffrances de mon père qui se mourrait d’un cancer généralisé. Il a suffi pour cela d’augmenter considérablement les doses de morphine ce qui d’un côté amenuisait la souffrance et de l’autre augmentait le processus de destruction des cellules, l’amenant plus rapidement vers sa fin.
    Ma sœur et moi gardons pour nous ce secret, à la demande de notre père, car il savait que jamais ma mère ni mes frères ni mon autre sœur ne serait d’accord avec cela. Et lui voulait en finir. Il ne supportait plus d’être diminué de la sorte et savait que bientôt il ne serait même plus en mesure de nous le demander.
    Je n’ai jamais regretté, et je suis sûre qu’il en est de même pour ma sœur, d’avoir pris cette décision. Mon père est mort le plus dignement possible. C’était là son dernier pouvoir, sa dernière prière, son dernier acte d’humain libre.
    A propos de ce témoignage que tu relayes, je suis littéralement ulcérée par une telle méchanceté, c’est le mot qui me vient à l’esprit. Que fait cette femme dans un milieu médical ????
    Ce pauvre homme aura dû subir cela en plus de tout le reste ? C’est intolérable.
    Il faudrait donner le nom de cette femme et lui faire « payer » le prix de sa cruauté et si ce n’est la renvoyer, au minimum la surveiller de près.
    La vie nous est donnée. Nous en faisons ce que nous pouvons bien plus que ce que nous en voulons, la plupart du temps. Et puis arrive un moment où elle nous échappe. Maladie, accident, vieillesse.
    Alors je crois qu’autre chose s’ouvre en nous que les biens portants ne peuvent encore concevoir.
    Il y a alors d’autres priorités que celle de vivre à tout prix.
    Je suis donc fortement pour le droit à l’euthanasie à qui le demande en toute conscience, surtout dans le cas de ce vieil homme, qui avait toute sa tête et toute sa clairvoyance.
    Connais-tu le film de Clint Eastwod : » Million dollar baby » ? Si non, je te le conseille vivement, c’est un petit bijou. Qui, en conclusion parle très bien de ce sujet.
    Bises

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    1. Effectivement la dignité prime sur tout le reste, quelle que soit l'option choisie d'ailleurs, que ce soit la demande d'euthanasie ou le refus d'acharnement thérapeutique.


      Dans le cas ci-dessus, la demande était claire, faite en toute conscience. Il n'y avait aucune raison de la refuser.

      Si je reconnais qu'un médecin puisse refuser d'agir contre sa conscience, je lui dénie le droit d'imposer sa vision des choses au demandeur. Que la doctoresse dans ce cas ci y ait ajouté une bonne dose de sadisme, me révulse.

      L'été passé, j'ai eu le temps et pas mal de raisons d'y songé sérieusement. Pas pour faire une demande immédiate, évidemment. Mais pour préparer ma "sortie" au cas ou mon cancer évoluerait négativement.

      Je suis profondément athée, ceci explique peut-être cela. Pour moi, ni paradis, ni enfer ne m'attendent de l'autre coté. Après la mort, il n'y a rien. (Ceci n'engage que moi). Donc, reste la vie. Et à mes yeux, la vie mérite qu'on la respecte. Donc que je me respecte. D'où une seule évidence : lorsque la vie n'est plus la vie, lorsque le corps à renoncé à permettre la vie (chacun posant ses propres limites personnelles) il faut avoir la possibilité de partir dignement.

      Personnellement, j'ai toujours sur moi un papier mentionnant clairement mon refus de tout acharnement thérapeutique et ma demande d'euthanasie active. Ceci au cas, ou je tomberais dans le coma, je serai incapable de m'exprimer ou tout autre raison. Mes proches connaissent cette volonté. J'ai toute raison de croire qu'ils feront le nécessaire si besoin.

      Pour en revenir à ce médecin, j'espère que plainte sera déposée, qu'elle soit poursuivie pour non-respect de la loi. Au minimum. Ses croyances, sa religion pour respectables qu'elles soient, ne l'autorisent pas à imposer "sa" vision de la vie à autrui ! Surtout dans un contexte aussi important que la vie ou sa fin.

      J'en ai un peu marre de tous ces croyants (quelque soit leur religion d'ailleurs) qui essayent de nous imposer les lois de vieux livres poussièreux. Nous sommes au VVIième siècle ! Il serait temps qu'ils reviennent un peu sur terre ! S'ils aiment croire à ces balivernes, c'est leur droit, je le respecte. Mais je refuse qu'ils m'imposent (et imposent aux autres) leurs idéologies.

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  3. Je faisais partie des proches de ce vieux monsieur, qui a pour nom Jean-Marie Tesmoingt et qui était un type formidable. J'espère que beaucoup de sites tels que le vôtre auront à coeur de relayer l'information de ce scandale. Il me démange de vous donner le nom de l'hôpital et celui du toubib...

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    1. Bonjour.

      Je ne connaissais pas Monsieur Tesmoingt mais son témoignage posthume m'a touchée, émue et révoltée.

      J'en veux également au "Soir" de ne pas avoir publié le nom de l'hôpital. Après tout, nous avons le droit de savoir de quelle "obédience" est un établissement où nous risquons d'atterrir un jour par accident !

      Je trouverais donc normal qu'une loi oblige les établissements hospitaliers soient obligé d'afficher leur choix en la matière. J'irais même jusqu'à le demander aux médecins. Non pour juger ceux qui par convictions refusent de pratiquer l'euthanasie, mais pour éviter de tomber dans leurs mains.

      Pour le nom de l'hôpital de Jette qui a accepter d'accéder à la demande de Mr Tesmoingt, il me paraît évident qu'il s'agit de AZ-VUB.

      Quand à l'hôpital qui a eu l'indécence de refuser, vu l'avis de faire-part et l'adresse des funérailles, j'en déduis qu'il s'agit de Ste Elisabeth à Uccle. Mais je peux me tromper, auquel cas n'hésitez pas à démentir.

      Pour le toubib, enfin si elle mérite ce titre, je ne sais pas. Simplement j'espère que la justice se penchera sur son cas.

      J'espère aussi que beaucoup de sites relayeront l'information. Nous vivons dans un état de droit, un état démocratique, des lois existent, elles doivent être respectées. Par TOUS !

      Toutes mes pensées à la famille et les amis de Mr Tesmoingt. Il est déjà très triste de perdre un proche, les circonstances ici, ne font qu'ajouter de la colère au chagrin.

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  4. En me relisant, je me rend compte que :

    1) j'ai fait plein (mais alors plein) de fautes d'ortho dans mes commentaires.

    2) que je donne l'impression d'en vouloir à tous les croyants de la terre.

    Alors, pour les fautes, désolée. Il n'y a pas moyen de corriger les commentaires sur blogger, donc tant pis.

    Pour le reste, s'il est vrai que je boufferais bien du curé, de l'imam ou du rabin à chaque petit déjeuner (encore me faudrait-il pouvoir les mastiquer), je respecte les croyants. Je leur demande simplement qu'ils permettent à ceux qui ne partagent pas leurs points de vue de vivre et mourir comme ils l'entendent.

    Une manifestation anti-avortement ce dimanche à Bruxelles a encore démontré (comme ci besoin était) qu'intolérance et croyance font souvent, trop souvent bon ménage.

    Je n'oblige personne à demander l'euthanisie, ni à pratiquer un avortement. Mais d'autre part, je refuse que l'on interdise l'un ou l'autre. Que chacun fasse son lit comme il se couche et regarde midi à sa porte, le monde ne s'en portera que mieux ;)

    Voilà, j'espère

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  5. Je comprends bien ce que tu veux dire et pourquoi tu viens préciser ce que tu penses au fond de toi.
    Comme toi je suis profondément athée. J'ai le respect de toutes les religions... pour peu qu'elles soient elles-mêmes respectueuses.
    Les religions qui voilent les femmes ou les lapident, qui excisent les petites filles, qui bannissent, expulsent, assassinent, décident à la place des autres, je ne peux pas les respecter.
    Ma mère par exemple est chrétienne. Pour elle, pas question de suicide, pourtant je ne l'ai jamais entendu juger le suicide des autres ! Alors qu'elle est très croyante, très pratiquante, jamais elle n'a jugé ceux qui ne pensait pas comme elle.
    D'ailleurs, pour moi la religion devrait être quelque chose de très intime.
    Pour en revenir à l'euthanasie, c'est un choix personnel. Si la personne est d'une religion qui l'interdit, à lui de faire son choix. A ce que je sache, chacun est libre de sa vie pour peu qu'il ne fasse de mal à personne.
    En l'occurrence, cette femme, en malmenant de la sorte ce pauvre homme déjà trop plein de souffrances n'est à mes yeux qu'une sadique qui devrait bien se faire soigner.
    Que l'hôpital ne l'ai pas déjà mis sur la touche (parce qu'on ne fera pas croire que ses supérieur ne savent pas qui elle est) sont tout autant coupable.
    Je pense comme toi, qu'il faudrait donner le nom de cet hôpital pour que les gens qui y vont sachent à qui ils ont à faire.

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  6. Cette histoire de médecin sadique me révulse aussi. J'espère que quelqu'un porterai plainte contre elle. A la place des descendants de cet homme, je le ferais sans hésiter une seconde, avec le maximum de publicité possible. Il faut la mettre hors d'état de nuire !

    Et si jamais je tombais gravement malade ainsi, je déménagerais en Belgique pour pouvoir bénéficier de cette loi que je trouve primordiale. Question de respect, en effet. Quand une s** ne vient pas mettre des bâtons dans les roues.

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    1. Merci de ce commentaire Pastelle :)

      En France deux candidats seulement sont prêts à en débattre : Mélenchon et Joly. Les deux sont pour, faut-il le dire ? sourires.

      J'espère que la loi passera chez vous, il faudrait d'ailleurs que ce devienne un droit européen ! Ca changerait nos parlementaires respectifs de voter pour l'humain plutôt que pour les banksters !

      Et j'espère surtout que tu n'auras jamais à devoir déménager pour cette raison !

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