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mardi 10 avril 2012

Utopiste...


Il serait bien évidemment illusoire, voire utopiste, de s'imaginer qu'une femme égocentrique, narcissique à tendance perverse depuis des décennies, devienne une vieille dame gentille et empathique au crépuscule de sa vie...

Oui évidemment...  C'est utopique.  Je le sais bien.  La vieille dame, je la connais depuis près de 30 ans.  Elle n'a jamais réussi à m'atteindre directement, (j'ai trop d''instinct de survie pour ça), mais indirectement, elle n'a jamais raté son coup.  Ou rarement.  Mais j'ai assez de caractère que pour survivre à ça.

Par contre, j'en connais quelques-uns qui en souffrent encore aujourd'hui.  Certains se sont éloignés.  D'autres, comme son fils, sont tombés dans ses filets.  Et le fils il en bave pour l'instant.  Je te promet que cela me fait mal au coeur.  Elle le harcèle tellement, jouant sur tous les registres (larmes, colères, culpabilisation, reproches, chantage, plaintes, arrogance, mépris et je t'en passe) qu'il se retrouve complètement paumé face à la situation.  Et forcément, il passe de la tendresse la plus pure à la haine profonde, changeant d'option au gré du comportement de sa mère. 

Maintenant, et cela fait des semaines que cela dure, la vieille dame à trouvé comique (enfin façon de parler) de faire téléphoner d'autres malades, des aides soignantes, des infirmiers, à son fils pour lui dire qu'elle veut le voir immédiatement, qu'elle n'aime plus sa chambre, que la nourriture n'est pas bonne, qu'elle a besoin de mouchoirs, qu'il ne vient pas la voir, qu'elle voudrait qu'il lui ramène un gilet, qu'elle ne veut pas rester là, qu'elle a fait tomber un plateau...  je t'en passe, la liste est trop longue.

Hier j'ai intercepté l'appel.  En substance, une aide-soignante me dit : "La vieille dame m'a demandé de téléphoner à son fils pour qu'il lui apporte à manger."  Ma première surprise passée, j'ai éclaté de rire.  Je demande à mon interlocutrice : "vous ne la nourrissez pas ?"   ...  un silence...  Je continue "veut-elle qu'on lui amène un menu chinois ou préfère-t-elle italien?"

Là la jeune femme comprend que je me marre.  Je lui demande : "plus sérieusement qu'est-ce qu'il se passe ?"

Elle me répond que la vieille dame a refusé un premier plateau, parce qu'elle n'aimait pas, qu'alors ils lui ont amené un autre plateau, avec du poisson, celui-là, mais qu'elle l'a repoussé aussi.  Et que depuis elle exige qu'on téléphone à son fils pour qu'il lui apporte à manger...

Ben voyons !

Je calme l'aide-soignante comme je peux (tu avoueras que c'est un comble !  rires) et je lui dit de ne surtout pas céder à tous les caprices de la vieille dame, qu'après tout vu qu'elle est toujours nourrie via "biberon" (système dont j'ai oublié le nom exact mais qui nourrit le patient directement dans l'estomac) il n'y a aucune inquiètude à avoir quand à ses besoins alimentaires.   Et elle m'avoue : "oui, je sais, mais vous ne comprenez pas, elle nous harcèle!  Elle est méchante, méprisante, hautaine.  Elle n'arrête pas"  Elle ajoute : "si ce n'est pas moi qui vous téléphonais, elle aurait été dérangé tout le monde, même d'autres malades pour qu'ils le fassent".

Nous voilà bien...  :/

Faire comprendre à son entourage, et à son fils en particulier,  que, tout espoir de changement positif dans ce comportement s'apparente à un voeux pieux, peut-il être constructif dans le cas présent ?

Je t'avoue, toi qui me lis, que je suis perplexe.   Parce que tu vois j'ai peur qu'à force d'exaspération, certains, par défense, par auto-protection, aillent jusqu'à la maltraitance psychologique, affective (voire plus) pour calmer la vieille dame. 

Je ne m'exprime peut-être pas correctement, mais hier (cfr mon billet précédent) j'avais des envies de meurtre en voyant la souffrance de Mat.  Souffrance qu'il ne mérite pas, ça je peux l'affirmer.   Et parfois quand il m'exprime sa lassitude, son envie que tout cela finisse, le poids que représente sa mère, quand il va jusqu'à me dire la haine que sa mère déclenche parfois en lui, je me sens paumée. 

Que faire, que dire ?...




8 commentaires:

  1. Ce qui est difficile dans le cas présent, c'est que ce n'est pas ta mère, tu n'est pas sa fille, enfin, tu comprends quoi.
    Intervenir dans les filets complexes d'une relation entre une mère et un fils, c'est toujours délicat, même lorsqu'on à le sentiment que l'affaire est claire, ici en l'occurrence du harcèlement et de la mauvaise conscience, tout est bien plus compliqué car cela remonte à l'enfance.
    Il y a ce qui est visible et ce qui ne l'est pas.
    Même Mat n'a pas toutes les cartes en main car il ne pourra jamais comprendre les réelles motivations de sa mère.
    Reste juste son taux de tolérance.
    Jusqu'où est-il près à aller pour entretenir ce jeu malsain.
    Je crois que ce que toi tu peux faire, c'est exactement ce que tu fais déjà. Dire la vérité de ce que tu constates. Soutenir ton ami quelles que soient ses postures, même lorsqu'elles te semblent inappropriées. Compatir à sa souffrance.
    Cette vieille dame qui souffre, me semble assez intelligente pour savoir que si elle continue à agir de la sorte, le personnel hospitalier va se retourner contre elle. Ce n'est pas à toi de craindre ça. Tu n'es pas "l'amie de cette femme" tu es l'amie de son fils. Si ça doit arriver, peut-être que ça pourra calmer le jeu et alléger la posture de Mat.
    Ce qui est clair c'est qu'elle ne changera pas. La souffrance ne pourra qu'accentuer ce trait de caractère qu'elle avait déjà. Si elle avait du changer, elle l'aurait fait avant, au minimum à l'annonce de sa maladie comme ça arrive à certains.
    Non, vraiment, plus je réfléchis et plus je ne vois qu'une issue. Seul Mat peut décider que les choses s'arrête là. C'est le seul capable de prendre cette décision et pour ça il faut qu'il définisse une ligne. A partir de quand ce ne sera plus supportable pour lui.
    Peut-être alors, peux-tu l'aider à définir cette ligne.
    Courage ma belle. C'est un drôle de hasard que cette femme là, justement elle, souffre de ce même mal que le tien.

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    1. Vrai que le hazard (je préfère mettre un "z" à ce mot là, va savoir pourquoi...) a un humour plus que douteux.

      Quant à Mat, s'il est vrai que cela me fait mal au coeur de le voir souffrir et se débattre ainsi, j'ai confiance, il trouvera le juste chemin. Simplement ça va être long et compliqué. Mon rôle dans l'histoire ? je crois que je devrai faire dans l'improvisation. M'adapter au fil des jours à une réalité souvent changeante.

      Mais...

      Comment dire. Je vais essayer de m'exprimer clairement, ce qui vu mon état d'esprit du moment n'est pas une sinécure...

      La vieille dame est atteinte de narcissisme, d'égocentrisme si tu préfère. Elle en souffre. Réellement. Elle est incapable de se rendre compte de ses actes et d'imaginer un seul instant qu'elle fait souffrir son entourage.

      Pour elle, tous ceux qui l'approchent sont ses sujets, des êtres qu'elle peut manipuler à son gré pour obtenir ce qui lui semble essentiel dans l'instant.

      Elle ne se contrôle plus à ces moments là. Elle a un désir, elle l'exprime, si personne ne la satisfait dans l'instant, elle commence à manipuler, par tous les moyens qu'elle peut imaginer, pour obtenir ce qu'elle veut malgré tout.

      Pour moi cela relève de la psychiatrie et elle aurait du être aidée depuis longtemps, depuis des années. Mais comme ce comportement exprime aussi une bonne grosse dose de perversité, les gens s'éloignent, ignorent ou composent avec. C'est plus simple pour tout le monde. Donc personne ne fait rien.

      Evidemment maintenant qu'elle est affaiblie (enfin sauf quand elle crise, parce que là bonjour la furie) les gens commencent à se révolter autrement qu'en s'éloignant.

      Et c'est ce que j'essaye d'exprimer dans l'avant dernier paragraphe de mon billet, jusqu'où sont capables d'aller les gens par exaspération, par dégoût, par fatigue fasse à une vieille dame aussi difficile à vivre ?

      Pero elle m'a déjà donné des envies de meurtre. Puis je me calme, je réfléchi, je respire... et en finale je me calme...

      Mais d'autres ? Quid du personnel, quid de tous ceux qui l'approchent encore, quid ? Ou commence la maltraitance? Comment la prévenir, comment l'empêcher ?

      Le frontière est fragile, non ?

      Tu vois, je crois qu'on a beaucoup plus conscience de la limite à ne pas franchir lorsqu'on est face à un petit enfant que lorsqu'on est face à un vieux agressif...

      Bon je continue à réfléchir à tout cela, je te ferai part de mes cogitations futures

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    2. oui, je comprends mieux, tu as eu raison de venir préciser à nouveau ce que tu avais pourtant bien expliqué dans ton billet.
      C'est vrai qu'il serait tentant de faire payer le prix à cette femme de son incapacité à être autrement que ce qu'elle est.
      C'est clair qu'il aurait fallut l'aider avant, même si bien sûr il y a des gens plus dur à aider que d'autres.
      En même temps, un hôpital n'est pas le meilleur endroit pour ça, où on soigne le corps et très peu l'esprit !
      C'est un sujet difficile et un cas particulier dont peu de gens peuvent saisir la nuance.

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    3. Là maintenant elle est en maison de revalidation. Mais ça ne change rien, elle rend le personnel littéralement fou ! Purée je les plains les pauvres.

      Déjà que c'est un métier difficile et mal payé, si en plus ils doivent subir ce genre de sirène... ce doit être comme un avant-goût de l'enfer !

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  2. Je vis, toutes proportions gardées, une situation assez semblable avec ma mère. Il faut se protéger. j'ai décidé d'être parfois un peu égoïste, le prix de la survie, au contraire de ma sœur qui s'y use la santé, croyant bien faire.

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    1. Tu as raison Calyste, il faut se protéger. L'égoïsme est parfois le prix de la survie.

      Je vais peut-être passer pour un monstre, mais j'estime que ma vie à autant de prix que la vie d'un ou d'une autre, sinon plus (du moins à mes yeux) et que par conséquent je n'ai pas à souffrir inutilement, ni à laisser d'autres me faire souffrir.

      Pourtant je te promet que je met longtemps avant de couper les ponts, de m'éloigner, ou plus simplement de prendre le parti de l'indifférence. Très longtemps.

      Mais la maladie aidant, ce délai a tendance à se raccourcir. La vie est trop belle, je n'ai plus le temps de servir de défouloir à quiconque :)

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  3. C'est sûr qu'en te lisant, et alors même que je ne la connais pas (merci bien), j'avais envie de lui donner un bon coup de pelle derrière la nuque, alors...
    Je lis dans les réponses que tu donnes aux commentaires que son comportement a l'air bien installé - autant dire structurel - et pas du tout lié aux affres du vieillissement.
    Si elle aime un peu lire, essaie de lui trouver un polar où des infirmières à bout de nerfs règlent leur compte à des vieilles insupportables. Ca la fera peut-être flipper.
    Et tu n'as jamais été tenté de la faire flipper, entre quatre z'ieux, genre tu la choppes par le col et tu lui dis que la prochaine fois tu lui colle une dérouillée, toute vieille qu'elle est (ok, dis juste que tu la plantes là avec son sac de linge) ? Ou alors, plus soft encore (parce que j'ai bien l'impression qu'au fond la victime collatérale serait ton ami Mat'), tu lui rends son linge en fractionné, histoire qu'elle apprenne à s'économiser...

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    1. rires..


      Pour la lecture c'est rappé elle ne feuillette que les revues de modes, et les "voici", "gala" et autres "madame figaro"...


      Vrai que lui rendre son linge façon "puzzle" j'y ai pensé aussi, ou d'oublier le fer à repasser dessus, tu vois? :)

      Mais comme je suis une nana sympa, je n'ai pas (encore) fait ^^

      ;)

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